AVANT - PROPOS
Nous utiliserons soit le terme « missile tactique », soit le seul terme « missile », lorsqu’il n’y a pas de risque de confusion. En 1945, c’est l’appellation « engins spéciaux » qui a été utilisée pour désigner les armes autopropulsées et guidées, ainsi que la section du Service technique aéronautique (STAé) responsable de ces armements. C’est la même appellation qui a été retenue, dans les années 1950, par le STCAN (Service technique des constructions et armes navales) pour désigner son groupe. Ce terme n’était pas « beau » et n’était pas compréhensible par les interlocuteurs. Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, l’appellation guided weapons fut la première utilisée, mais l’appellation « missile » fut rapidement employée (ce nom a une origine latine). En 1967, lors d’une réorganisation au STAé, le terme « missile » remplaça le terme « engins spéciaux » pour désigner la Section. Lors de la fusion, en 1970, des différents services responsables de missiles tactiques au sein de la Direction technique des engins (DTEN), le terme « engin » fut à nouveau utilisé ; le nom du service responsable fut « Service technique des engins tactiques ». Mais le qualificatif « spécial » disparaissait au profit de la différentiation entre « stratégique » et « tactique ». Le dictionnaire des mots recommandés, suivant un arrêté de 1976, indiquait le terme « missile » : le terme « engin » devenait obsolète. Mais il fallut attendre le décret du 5 octobre 1989 pour qu’en France, « missile » soit totalement substitué à « engin » ; la dénomination de la DTEN fut alors modifiée en Direction des missiles et de l’espace (DME). Le présent document ne concerne que les missiles tactiques. La distinction entre missiles stratégiques et missiles tactiques est fondée, depuis la fin des années 1980, sur la différence de mission ; si les missiles stratégiques sont équipés d’une charge nucléaire, les missiles tactiques sont équipés d’une charge conventionnelle. L’appellation de « missile préstratégique » est employée pour désigner des missiles équipés d’une charge nucléaire et dont la mission peut être considérée comme tactique ; en France, c’est le cas du Pluton, d’Hadès et de l’ASMP (air-sol moyenne portée), ce dernier étant un missile aérodynamique équipé d’un statoréacteur. Nous ne ferons pas l’histoire de ces missiles pré-stratégiques, mais nous citerons l’ASMP, qui, sur de nombreux aspects, est proche d’un missile tactique. L’objet de ce document est l’histoire, d’une part des missiles développés sous la responsabilité de la DTIA (Direction technique et industrielle de l’aéronautique) et de la DTCA (Direction technique des constructions aéronautiques), d’autre part des missiles développés, après 1970, sous la responsabilité de la DTEN. Mais nous citerons les missiles développés sous la responsabilité des autres directions, de manière à avoir une vue globale. Nous présenterons aussi les missiles étrangers concurrents, de manière à mieux cerner la place internationale des missiles français. Ce document doit être considéré comme une contribution à l’histoire des missiles tactiques. Le plan choisi comporte un découpage des cinquante années couvertes, de 1945 à 1995, en trois périodes et, pour chaque période, un exposé des acteurs et un exposé des programmes. Il en résulte malheureusement quelques redites. Nous nous en excusons auprès des lecteurs. La rédaction de ce document a tenu compte, en plus de nos propres souvenirs sur les faits survenus après 1956, des informations et des observations fournies par les pionniers des missiles : l’ICA Michel Decker (†), qui a accepté d’apporter son témoignage sur la première période ; l’IGA Maurice Brunet, qui nous a fourni des informations peu connues sur les missiles navals ; l’IGA Jean Soissons, qui a bien voulu commenter les deux premiers chapitres ; M. Léon Beaussart et M. Jean Guillot, sur les missiles Nord-Aviation ; M. Yves Hebel et M. Jean Paolorsi, sur les missiles Matra ; M. Jean Climaud sur ESD (Électronique Serge Dassault) ; M. Jean Turck sur l’infrarouge. D’autres « acteurs » ont collaboré à ce travail : M. Jacques Amann, qui, avec son long passé de missilier, nous a fourni d’importantes informations, en particulier sur les missiles étrangers ; l’IGA Marcel Bénichou, sur les budgets ; l’IGA Jean Carpentier, sur l’ONERA (Office national d’études et de recherches aéronautiques) ; l’IGA Esmenjaud, sur le rôle du STAé/AR (armement) durant la première période ; M. Philippe Jung (historien et non acteur), sur l’histoire des missiles SNCASE (Société nationale de constructions aéronautiques du Sud-Est) ; l’IGA Bernard Laurent, qui nous a donné son avis sur la période de 1975 à 1995, en tant qu’ancien responsable à la DTEN ; l’ICA Jacques Mijonnet, sur ESD ; l’ICA Jean-Claude Renaut, sur le R 422 et le guidage inertiel ; l’ICA Philippe Turpin, sur Matra. Nous avons aussi tenu compte des archives du Service historique de l’armée de l’Air (SHAA), surtout pour la première période,, et utilisé différentes publications, en particulier celles éditées par le Comité pour l’histoire de l’armement terrestre à propos des missiles1. On pourra également se référer à la bibliographie placée en fin d’ouvrage. Nous remercions toutes ces personnes de leur coopération. Nous remercions l’IGA Jean Soissons, qui fut notre directeur, d’avoir bien voulu rédiger la préface ; elle complète notre texte en indiquant l’origine lointaine des missiles et elle montre sa culture historique. En outre, nous remercions pour leur amabilité le personnel du SHAA pour la recherche d’archives et celui de l’ECPAD (Établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense) et des services des médias de la société MBDA (anciennes sociétés Aérospatiale missiles et Matra) pour la recherche et la mise à disposition de nombreuses illustrations. Ces publications sont disponibles auprès du Département d’histoire de l’armement. Nous exprimons notre gratitude à Claire Lemercier et Patrice Bret, responsables scientifiques successifs du Département d’histoire de l’armement, qui ont mis en forme le manuscrit, et à Françoise Perrot, qui nous a assisté pour l’édition. Nous avons pris le risque de citer les principaux « acteurs », à notre connaissance ; la liste ne pouvait être que limitative, et nous avons tenu compte de l’avis de ceux qui ont participé à la rédaction ; des « acteurs » ont été oubliés : nous nous excusons.
1 Comité pour l'histoire de l'armement terrestre, Armements antichars, par M. Stauff (†), puis par MM. Guillot et Dubernet (tome 10), 2002, et Systèmes de missiles sol-air, par l’ingénieur général Collet-Billon (†) puis l’ingénieur général Bienvenu (tome 11), 2002.
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