Histoire des lanceurs Diamant : 1957 à 1964
1957 L'URSS lance le premier satellite de la terre le 4 octobre. Avant même ce lancement, une mission française aux U.S.A. comprend que le missile balistique est le bombardier de l'avenir ; des calculs de performance montrent déjà que l'engin envisagé (de la taille du "Polaris ") pourrait donner naissance à un lanceur spatial.
1958 Un comité officiel présidé par l'ingénieur général Gérardin procède à une investigation des ressources françaises face aux besoins qu'exigent l'étude et la réalisation de missiles balistiques. Ce comité estime que cette réalisation est possible, et conseille l'utilisation de moteurs à propergols solides.
1959 En octobre naît la Société pour I'Étude et la Réalisation d'Engins Balistiques (SEREB). L'État lui confie la responsabilité des études et des fabrications nécessaires à la réalisation des missiles balistiques (sous la direction et le contrôle du Département " Engins " de la D.M.A. à partir de 1961). C'est l'époque du choix des " techniques de base" à développer dans divers domaines pilotage, guidage, moteurs, matériaux. La réalisation ultérieure d'un lance satellite est toujours envisagée en fonction des techniques choisies.
1960
La première étude marquante de lanceur date
de janvier : divers avant-projets voient le jour, mais dès le mois de mai
est proposée une procédure de mise en orbite schématisant de façon
remarquable le Diamant actuel. Cet avant-projet aurait abouti à la mise en
orbite d' un satellite de 25 kg, valeur jugée ensuite trop faible. Mais il
était déjà question d'une fusée à trois étages, dont le premier à
carburant liquides et les deux suivants à poudre, avec phases de
basculement et de mise en rotation du lanceur.
Le 23 décembre, la Société pour l'Étude et la Réalisation d'Engins Balistiques (SEREB) arrive à la conclusion ferme qu'il est possible, depuis le véhicule militaire d'essai biétages Saphir , d'obtenir un lanceur de satellites dérivé, baptisé Diamant, en lui ajoutant un troisième étage à poudre. C'est alors qu'intervient, la décision de principe de réaliser "Diamant ". La DMA se charge de la mise au point du lance satellite et de la qualification de ce lanceur par l'envoi de quatre satellites du type A 1, le CNES finançant la transformation de " Saphir " en " Diamant ", soit environ 15 % du prix total. Bien entendu, la SEREB est désignée comme maître d'oeuvre de l'opération " Diamant ", qui exige par ailleurs, pour essayer en vol le troisième étage et le futur satellite, l'utilisation d'un " booster ". Ainsi naît Rubis (VE. 210) composé d'" Agate " et de ce troisième étage.
1961 22 juillet, Pierre Piganiol, délégué général
à la recherche scientifique et technique, demande au secrétaire du Comité
des recherches spatiales de préparer un schéma de statut pour un
établissement public doté de l'autonomie financière.
18 décembre, la décision de réaliser le projet Diamant est prise par le gouvernement français, lors d'un conseil interministériel restreint sur l'espace. Sa construction, par la Délégation Ministérielle pour l'Armement (DMA), département engin (DEN), est inscrite au budget de l'année 1962.
1962 9 mai, signature d'un protocole d'accord
entre le Centre National d'Études Spatiales (CNES) et la Direction des
ENgins (DEN). Le CNES, confit par
convention à la Délégation Ministérielle pour l'Armement (DMA) le soin
d'étudier et de réaliser un lanceur civil issue des réalisations
militaires : le Diamant A.
Un lanceur spatial est un ensemble
compliqué, dont la sûreté de fonctionnement globale dépend essentiellement
de la sûreté de marche de chaque élément. D'où l'observation rigoureuse,
en ce qui concerne " Diamant " des règles suivantes :
Pour réaliser Diamant, il fallait ajouter une " case à équipements " et un troisième étage au VE 231. Les travaux supplémentaires correspondants ont été effectués sous la responsabilité de la Direction Technique des Engins de la Délégation Ministérielle pour l'Armement, mais ils ont été financés par le CNES. La maîtrise d'oeuvre du lanceur a été confiée à la SEREB qui joue le rôle de maître d'oeuvre pour la quasi totalité des engins français de grande puissance. C'est la quasi totalité de l'industrie aérospatiale française (LRBA, SNECMA, Sud-Aviation, Nord Aviation, MATRA, SEPR, ONERA, la Direction des Poudres, la SAGEM, 'la 'SFENA, la SAT., Air Équipement, etc.) qui participe à sa réalisation. Les lanceurs ont été assemblés au bâtiment B21 du CAPE (Centre d'Achèvement des Propulseurs d'Engins) en Aquitaine dans les installations de la SEREB.
Le développement du Diamant A commence avec les essais de l'étage Topaze, qui est en fait la première fusée française pilotée. Le VE111 Topaze, est un engin de même diamètre mais plus court qu'Agate VE110. Il est propulsé par un bloc Soleil chargé de 1500 kg d'Isolane, poudre plus performante que la Plastolite. Doté de quatre tuyères rotatives, c'est le premier engin piloté de la série. Ainsi, il peut être tiré depuis un socle alors que les VE10 et VE110 utilisaient une rampe. Deux versions sont produites successivement, le VE111C (Court) à moteur NA802 et le VE111L (Long) à moteur NA803.
Six exemplaires du VE111C, sont prévues
d'ici fin 1963 pour mettre au point le pilotage par braquage des
tuyères.
1963 Entre le 22 mars et le 27 juin, le CNES réalise 4 autres tirs du Topaze version courte pour mettre au point le lanceur Diamant A. Le 24 octobre a lieu le dernier tir du VE 111 Topaze en version courte depuis Hammaguir. Dix VE111 avaient été prévus pour cela, mais après cette série de six succès, il est décidé de réserver les quatre restants à l'étude du pilotage d'engins plus instables tels que les MSBS. Après la version courte, la version longue qui est tirée une première fois le 21 décembre avec succès.
1964 Le VE111L est testé avec succès une autre fois le 11 mars. Deux autres exemplaires serviront à tester un système complet de guidage inertiel (version VE111LG Long Guidage) en mai 1965. Alors que le développement du 2ème étage Topaze, se déroulait normalement sans difficultés majeures, le premier étage Emeraude réserva de sérieuses difficultés.
10 juin, premier tir de la fusée VE 210 Rubis. Le Rubis permet de tester les seconds et troisièmes étages. Le second est pour l' occasion stabilisé aérodynamiquement ce qui permet l' expérimentation en vol de la charge utile du troisième étage: mise en rotation, séparation de la coiffe et du satellite. Le premier étage du Rubis est la première "pierre précieuse" Agate un propulseur mono tuyère de 80 cm de diamètre chargé d' un bloc de poudre de 1900 kg et fournissant 22 tonnes de poussée pendant 27 secondes. Le second étage est l' étage "terminal" du Diamant d' un diamètre de 65 cm réalisé en fibre de verre bobinée pesant 72 kg et contenant 650 k de poudre brûlant en 47 s. Une coiffe protége le tout (2,387 m de haut). Un second tir a lieu le 12.
15 juin, premier tir de la fusée Émeraude d'Hammaguir. Si le matériel propulsif fonctionne bien la trajectoire de la fusée n' est pas optimale. Il y a eu 12 tirs d' Agate depuis 1961, 9 de Topaze depuis 1962 et 2 de Rubis depuis le début du programme. Ce vol permet de tester en vol le nouveau moteur bi liquide Vexin de 28 tonnes de poussée mis au point par le LRBA. Ce demi succès relance le débat sur l'utilisation d'un étage à poudre de 10 tonnes en remplacement d'Émeraude. La discussion remonte très haut jusqu'au ministre, la DTEN étant contre le changement et le CNES semble partagé. Finalement la décision du ministre donne trois mois de sursis à l'étage liquide.
Le 17 juin, le second tir d'Émeraude se solde par une explosion en vol.
20 octobre, le troisième tir d'Émeraude
depuis Hammaguir est à nouveau un échec suite à un problème de
pressurisation de réservoir. Que s'était-il donc passé ?
Les gaz de chasse sont fournis par un générateur situé dans le réservoir de l'acide nitrique. Ce générateur comprend une charge de poudre Épictète E8 de 116 kg (bloc Meneles). La pressurisation est assurée par un mélange de gaz de poudre et de vapeur d'eau à une température inférieure à 300°. Un dispositif de régulation de gaz fonctionnant par comparaison entre la pression de chasse et la pression pilote fournie par un détendeur à partir de la haute pression de combustion de la poudre. La mise à feu du générateur est obtenue par les gaz de l'allumeur situé dans la jupe avant de l'étage qui enflamment un sachet de poudre noire, à la surface du bloc Épictète. La température fut réduite. Un dispositif anti-ballottement à flotteur fut placé dans le réservoir d'acide. |